Auteur : Philippe | Année : 1975 |
LE QUARTIER CHINOIS DE PARIS 13èPetite histoire |
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Première étape: une histoire d'industries Créé par décret impérial en 1860, le 13ème arrondissement fut l'un des huit nouveaux arrondissements de la capitale. La situation s'améliora tout au long du XXè siècle, et les taudis disparurent peu à peu, pour faire place à des HBM (habitations bon marché), équipés du confort moderne de l'époque. Malgré ces progrès, il subsista jusque dans les années 1970 un certain nombre d'immeubles délabrés et de petits pavillons anciens, dans lesquels habitait la population ouvrière, à proximité immédiate des usines dans lesquelles elle travaillait (Chocolat Meunier-Lombart, Panhard, Delahaye , Say, etc..).
La faillite de l'entreprise Panhard-Levassor en particulier et l'expatriation en banlieue ou en province d'autres industries (Chocolats Meunier, verreries, sucrerie Say, etc...) libéra d'immenses emprises, disponibles à la construction. Les usines Panhard
Paris vu par Le Corbusier en 1925
Troisième étape: le malheur des uns fait le bonheur des autres Bien plus que des bâtiments anciens, voire misérables, c'est tout un environnement, un cadre de vie, que Le Corbusier a détruit à jamais. L'avenue de Choisy en 1960 L'opération "Italie 13" a certes eu un effet positif: le remplacement d'un tissu urbain souvent en-dessous des normes de confort moderne par des immeubles à la pointe de la modernité, équipés de l'eau courante, de parkings, du chauffage collectif et de supermarchés.
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Mais, contrairement à la croyance trop souvent répandue, l'homme n'est pas qu'un consommateur. Il a aussi besoin d'un environnement familier, de coutumes auxquelles se raccrocher et de lien social. Tout ceci n'avait pas été imaginé une seconde par Le Corbusier qui, d'obédience marxiste, n'avait qu'une vision matérialiste des choses.
Et ce qui devait arriver arriva. Ceux pour qui ces grands ensembles avaient été construits refusèrent d'y habiter. Beaucoup d'ouvriers, qui avaient vu, le coeur serré, les bulldozers raser leur passé préférèrent quitter Paris pour des banlieues proches, mais loin des tours et des dalles auxquelles ils avaient du mal à s'habituer.
Ainsi, ces immeubles conçus selon les dernières normes, emblèmes du modernisme parisien, devaient attendre de longs mois avnt d'accueillir leurs premiers occupants. Trop chers pour les français moyens ou modestes, trop modernes pour toute une frange aisée qui leur préférait les quartiers centraux, il fallut brader les appartements qui ne trouvaient toujours pas preneurs ! Et puis, en 1975 ce fut la défaite des Américains au Viet-Nam. Ce fut aussi l'année des boat-people. Ces vrais réfugiés qui quittaient leur Viet-Nam, Cambodge ou Laos natal, en laissant derrière eux leur vie, leurs maisons, leurs amis, pour fuir des régimes communistes qui avaient fait de leur vie un enfer, au sens premier du terme. Ceux qui parvenaient à échapper aux pirates, à la noyade ou aux requins se dirigèrent tout naturellement vers la France, l'ancienne puissance colonisatrice, dont la plupart partageaient la langue. Débarqués à Paris, ils eurent l'immense surprise d'y trouver un quartier ultra-moderne, quasiment inhabité, dont les prix défiaient toute concurrence, et qui abritait déjà l'une des premières colonies asiatiques de Paris. Itinéraire du défilé du Nouvel an chinois dans le 13è arrdt
Et c'est ainsi que de nouveaux occupants remplacèrent les anciens, et créèrent la plus grande communauté indochinoise de Paris. Depuis, de nombreux chinois les ont rejoints, dans le quartier mais aussi à Belleville et dans le nord-est parisien.
Mais les asiatiques, Chinois ou Vietnamiens, le vélo ils connaissent On y croise donc tout à la fois des anciens habitants du quartier, comme mes beaux parents qui habitent là depuis près de soixante ans, des touristes qui déambulent, des livreurs surchargés, des anciens qui devisent sur les bancs, des étudiants venus de Jussieu, toute proche, des bonzes tout propres et généralement bien replets comme pouvaient l'être nos curés de jadis, des couples mixtes de plus en plus nombreux et avec des enfants bien tenus aux prénoms bien français et qui seront premiers en classe, en mathématique, français et en gymnastique et qui feront, probablement, plus tard, une grande école. |